Alors que juillet touche à sa fin, les marchés mondiaux abordent une période charnière, confrontés à une série d’incertitudes structurelles. Les décideurs politiques, les investisseurs institutionnels et les entreprises attendent avec prudence les publications macroéconomiques et décisions monétaires qui pourraient redéfinir les conditions financières globales pour le reste de l’année.

De Washington à Francfort, cette semaine s’annonce décisive. Au cœur de l’attention : une combinaison d’évaluations boursières euphoriques, de signaux ambigus provenant des banques centrales et de négociations commerciales sensibles. Le tout dans un contexte de décalage croissant entre économie réelle et marchés financiers.

Relations commerciales : un répit fragile sur les marchés

Vendredi dernier, les États-Unis ont annoncé un nouvel accord commercial avec l’Union européenne et le Japon. Ce compromis, qui prévoit des droits de douane limités à 15 % au lieu des 25–30 % initialement envisagés, a rassuré les marchés. Les indices S&P 500, EuroStoxx 50 et Nikkei 225 ont terminé la semaine en hausse, profitant de ce regain d’optimisme.

Mais cet apaisement pourrait être de courte durée. Washington a fixé au 1er août la date butoir pour conclure des accords similaires avec la Chine, le Canada et le Mexique. En cas d’échec, une nouvelle escalade tarifaire pourrait nuire aux chaînes d’approvisionnement et affecter les résultats des multinationales.

Banques centrales : l’inflation s’incruste, les taux se figent

Les projecteurs sont désormais braqués sur la réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed) prévue le 30 juillet. Malgré plus d’un an de politique monétaire restrictive, l’inflation reste résiliente : l’indice PCE (dépenses de consommation personnelles) a progressé de 2,9 % sur un an en juin. Les taux restent inchangés à 5,5 %, et les marchés anticipent une longue phase de statu quo plutôt qu’un pivot monétaire à court terme.

En zone euro, la Banque centrale européenne (BCE) maintient un discours prudent mais ferme. Son communiqué de juillet insiste sur le maintien des taux tant que l’inflation sous-jacente (actuellement à 2,7 %) ne montre pas de ralentissement net. L’Allemagne, moteur industriel du continent, continue de montrer des signes de faiblesse économique.

Comme le résume une note de BlackRock publiée le 26 juillet : « La Fed reste dépendante des données, mais le seuil pour un assouplissement est élevé. Le marché espère, mais la réalité macroéconomique appelle à la prudence. »

Résultats trimestriels : l’IA sous le feu des projecteurs

Plus de 160 entreprises du S&P 500 publient leurs résultats cette semaine, dont Microsoft, Meta, Amazon et Apple. L’euphorie autour de l’intelligence artificielle continue de porter les espoirs boursiers, mais les analystes deviennent plus exigeants.

Microsoft et Meta doivent désormais justifier des investissements massifs dans l’infrastructure IA. À l’inverse, Apple est pointée du doigt pour son retard stratégique dans ce domaine. Dans une note du 27 juillet, les analystes de Morgan Stanley préviennent : « Les valorisations actuelles supposent la perfection. La moindre déception pourrait entraîner une revalorisation brutale. »

Le Nasdaq 100 affiche déjà +34 % depuis le début de l’année, et les ratios cours/bénéfices anticipés reviennent à leurs niveaux de fin 2021. Un test de réalité s’annonce.

Risque de bulle : les signaux se multiplient

La Deutsche Bank, UBS ou encore Bank of America alertent : l’euphorie actuelle rappelle les excès de 2000 et 2007. L’endettement sur marge a bondi de 18,5 % entre avril et juin aux États-Unis, un niveau critique historiquement associé à des retournements de cycle.

Les valorisations atteignent des sommets dans presque tous les secteurs : les ratios cours/flux de trésorerie et cours/chiffre d’affaires dépassent les niveaux pré-Covid. Même si les bénéfices progressent, beaucoup s’interrogent sur la solidité des fondamentaux.

Services en forme, industrie en repli

Les indices PMI flash publiés jeudi dernier révèlent un clivage croissant dans les économies développées. Aux États-Unis, le secteur des services atteint un sommet de sept mois, porté par la consommation et la tech. Mais la production manufacturière plonge à 49,5, signalant une contraction.

En Europe, la tendance est similaire : recul marqué de l’activité industrielle en Allemagne et en France, alors que les services restent dynamiques. Ce déséquilibre rend l’orientation monétaire plus complexe, notamment pour les pays exportateurs.

Obligations : des poches d’opportunités mesurées

Dans l’univers obligataire, les investisseurs institutionnels redécouvrent l’intérêt des obligations souveraines à court terme et des titres investment grade couverts en devises. Le taux des Treasuries à 10 ans évolue autour de 4,45 %, et les spreads de crédit restent serrés.

BlackRock et PIMCO recommandent des expositions sur les MBS (titres hypothécaires) et sur la dette souveraine des pays émergents exportateurs de matières premières, offrant à la fois rendement et résilience face aux risques systémiques.

Perspectives

Les marchés actions continuent de récompenser l’optimisme, mais les signaux de retournement se multiplient. Le croisement entre résultats trimestriels, négociations commerciales et décisions de banques centrales pourrait marquer un point d’inflexion.

Les déséquilibres structurels, notamment entre services et industrie, deviennent plus visibles. Dans un environnement dominé par les anticipations, l’absence de clarté cette semaine ne sera pas sans conséquences.

Sources:

  1. Investopedia – What to Expect in Markets This Week
  2. MarketWatch – Big Tech Earnings & AI Spending
  3. Financial Times – Wall Street Euphoria Sparks Bubble Warnings
  4. Business Insider – Margin Debt Surges, Deutsche Bank Cautions
  5. Kiplinger – Federal Reserve July Meeting Preview
  6. BlackRock Investment Institute – Weekly Market Commentary (26/07/2025)
  7. T. Rowe Price – Global Markets Weekly Update
  8. The Australian – Markets Rise on Trade Certainty
  9. Bloomberg Terminal – PCE, PMI, Yields and Consensus Data
  10. Morgan Stanley – Equity Strategy Note, 27/07/2025